UNE ACTIVITÉ DEVENUE TRÈS LUCRATIVE.
Près de la moitié des organisateurs de thés dansants seraient dans l'illégalité
Si des milliers d'aînés dansent paisiblement, au son de la musette, sur les parquets des salles des fêtes le dimanche après-midi, dans les coulisses, en revanche, certains organisateurs se livrent une compétition acharnée. Où tous les coups semblent permis. Y compris la triche.
Et la justice ne rechigne pas à entrer dans la danse, comme en témoigne ce délibéré rendu voilà quelques jours par le tribunal correctionnel de Saintes.
Christian Hillaireau, l'un de ces promoteurs, a été condamné à 2 000 euros d'amende pour travail dissimulé. Il lui était reproché d'avoir employé des orchestres non déclarés dans les villes où il concocte une cinquantaine de thés dansants dans l'année (Saujon, Marennes, Soubise et Bourcefranc).
De la main à la main
À la barre, comme depuis le début de la procédure née en 2005 d'un contrôle de l'inspection du travail, il s'est défendu en déclarant que ces musiciens étaient bénévoles. « Uniquement des retraités, dont certains âgés de plus de 80 ans. Ils étaient même prêts à payer pour venir jouer », a invoqué Christian Hillaireau.
« Les thés dansants marchent tellement bien que des gens se sont improvisés musiciens », ironise Didier Arnaud, chef d'orchestre et membre du syndicat Snacopava (le Syndicat national des artistes, chefs d'orchestre professionnels de variétés et arrangeurs) qui a touché 1 euro de dommage et intérêt dans l'affaire. Selon lui, près de la moitié des organisateurs dans le département seraient dans l'illégalité. Notamment en s'arrangeant avec des musiciens, eux aussi peu sourcilleux. Au lieu de payer un orchestre 1 200 euros, les fraudeurs donnent, de la main à la main, moitié moins. Il se murmure qu'un ballet d'orchestres émigrerait d'un département mitoyen tous les week-ends. La discrétion toute charentaise de certains promoteurs serait particulièrement appréciée... « Pourtant, les musiciens ne sont pas couverts en cas d'accident », prévient Didier Arnaud.
Depuis quelques années, les thés dansants sont, en fait, devenus un marché lucratif dans lequel la concurrence est féroce. Un organisateur respectant la loi peut gagner près de 1 000 euros chaque dimanche, en accueillant 300 personnes.
Christian Hillaireau ne peut pas se targuer de connaître d'aussi jolies affluences. Vieux routier des thés dansants, il dénonce la concurrence fiscale déloyale dont il estime être victime de la part des nouveaux venus.
Pointés du doigt, d'autres promoteurs qui filoutent en multipliant les thés dansants, en s'appuyant sur des associations, un moyen pour éviter de prendre la contraignante licence d'entrepreneur du spectacle. La législation permet, en effet, aux associations de programmer cinq manifestations par an.
Selon nos informations, l'un de ces fraudeurs présumés a été récemment arrêté par les gendarmes, dans un département voisin. L'adhésion dans six associations colombophiles lui aurait permis d'orchestrer la tenue de 33 thés dansants depuis le début de l'année.
D'autres, enfin, auraient mis au point un ingénieux système de double billetterie. Ici, l'astuce serait de récupérer des billets pendant l'entracte pour les redistribuer la semaine suivante. Un fond de roulement, en quelque sorte, destiné à camoufler le montant réel des recettes.
Source Sud Ouest 20/05/09
Auteur : david briand
d.briand@sudouest.com